John Wick 4: L'expérience ultime de John Wick (2024)

John Wick 4 est le plus cher et le plus sophistiqué des films de la franchise, mais aussi le plus performant au box-office, malgré une durée ambitieuse de près de trois heures qui fait durer le plaisir des combats jusqu’au paroxysme. Une effervescence d’action au service d’une icone des temps modernes.

Synopsis : John Wick découvre un moyen de vaincre l’organisation criminelle connue sous le nom de la Grande Table. Mais avant de gagner sa liberté, Il doit affronter un nouvel ennemi qui a tissé de puissantes alliances à travers le monde et qui transforme les vieux amis de John en ennemis.

John Wick malade de la COVID 19

Critique :Envisagé comme un film en deux parties, alignant successivement les tournages des numéros 4 et 5, John Wick s’est surtout confronté à la crise de la COVID-19, comme tout humain, et a donc dû revoir son ambition à la baisse. Les perspectives n’étaient plus aussi certaines pour ses producteurs. Keanu Reeves prend de l’âge, les tournages et les assurances sont saisis d’une dynamique inflationniste et le marché du blockbuster s’écroule dans des multiplexes délaissés en raison, entre autres, de la concurrence des plateformes… Lions Gate opte finalement pour un chapitre final. Et quel chapitre ! Un montage cinéma de 2h50 et des dizaines de minutes en plus non exploitées démontrent un projet pharaonique loin des 20 millions de dollars de budget du premier opus en 2014 ; la durée de ce dernier dépassait à peine les 1h40. Au fil du temps, le deuxième chapitre passera à 40M$, le troisième, intitulé Parabellum, à 75M$ pour une durée de 2h10. Pris dans une dynamique de l’excès propre aux grosses productions des années 2010 et 2020, John Wick trouve logiquement le rythme de feuilleton des derniers James Bond avec Daniel Craig, et des Mission: Impossible avec Tom Cruise, deux sagas qui se sont imbibées de la sérialisation d’Harry Potter, reprise elle-même par Marvel, mais sans jamais être entravés par une médiocrité de script et une facilité des fonds verts (du moins pour les exploits de Tom l’invincible).

A cet égard, John Wick 4 (ou Chapitre 4 en France) est un spectacle total qui transcende la notion de cinéma kleenex en s’imposant comme un mastodonte de divertissem*nt. Des décors grandioses, une réalisation époustouflante de fluidité et de fulgurances, et un sens des combats qui rivalisent avec le jusqu’au-boutisme de la saga portée par Tom Cruise. John Wick le chichiteux est surtout John Wick le visionnaire car porteur d’une vision de l’image qui lui appartient. Nourri au cinéma des sœurs Wachowski et aux bobines hong-kongaises, le réalisateur cascadeur Chad Stahelski se débrouille toujours pour imposer sa physionomie de l’image, son découpage des plans, sa temporalité des séquences, et sa complicité avec Keanu Reevesqui transpire l’écran.

Keanu, l’ancien acteur boiteux, a connu une résurrection époustouflante au gré de cette saga à laquelle il accorde une ultime fois (?) la flexibilité de son corps et l’inexpressivité de son visage. Et il est bon dans la peau d’un être froid qui s’embrase par le désir de vengeance d’un chapitre à l’autre. Il a accordé à son personnage exigeant en entretien des mécaniques corporelles 9 longues années de sa carrière, pour une toute petite temporalité en terme de narration sur 4 épisodes qui se suivent sans faire de sauts chronologiques.

John Wick 4 renverse la Grande Table

Dans John Wick 4, son personnage a renversé la table des mafieux de la planète, dont on adore la pluralité, la Grande Table qui lui a refusé de sortir du crime en refroidissant son épouse bien-aimée, dont on revoit encore ici des apparitions furtives (les points faibles du premier chapitre dont l’émotivité était ratée). A vrai dire, le sujet n’est plus tant son épouse à venger, mais les ambitions de la Grande Table qui, désormais sous le contrôle d’un Marquis joué par Bill Skarsgård, s’est décidée à lui faire la peau tant elle se sent en danger. Elle a notamment semé sur son chemin des tueurs aussi implacables que lui, dont l’impassible Caine, tueur aveugle et ami de Wick, joué par le monumental Ip Man en personne, Donnie Yen. Cela conduira le film à culminer lors d’un combat d’honneur à l’ambiance volontairement funeste, aux pieds du Sacré Cœur, puisque toute la longue dernière partie, celle d’un duel avec le Marquis, s’éprend du décor parisien (la Porte des Lilas, le Trocadéro, l’Etoile…).

Pour décrire le combat final de John Wick 4, le terme “culminer” n’est peut-être pas le plus approprié pour évoquer cette fresque de lumières et de sang qui aime jalonner son avancée de combats absolument épiques. Les assauts sont meurtriers, d’une durée que d’aucuns qualifieraient d’excessive, en tout cas atypique dans sa régularité à situer le tempo du film et à ne pas se contenter d’illustrer une confrontation finale. Aussi, il est impossible de recenser les victimes frappées du sceau de la mort ; John Wick 4 est une tuerie au sens premier, perpétuel bouquet final sur 2h50. Par ailleurs, Wick lui-même n’est plus le seul personnage qui habite le récit aux pistes et métastases constantes. Au gré d’un fil conducteur globe-trotteur (le Japon ou l’Allemagne, notamment), les figures se multiplient et prennent une importance réelle dans l’intrigue, préparant la saga John Wick à un héritage au-delà de son personnage éponyme (une série sur l’hôtel Continental pour Prime Vidéo) et le spin-off Ballerina, avec Ana de Armas, promis aux salles pour l’été 2024. On y retrouverait d’ailleurs Keanu Reeves car l’action serait plantée entre les volets 3 et 4 de la saga épique.

Dans ce délire techno et mégalo, le montage s’érige au rang des grandes fresques du cinéma hollywoodien, avec des risques toutefois de dérouter par sa structure sûrement éreintante car constante. En absence de temps mort, le seul tort de John Wick 4 serait peut-être son trop-plein, celui d’une mécanique incessante et déshumanisante. Cela n’enlève rien à ses époustouflantes prouesses, mais cela l’écarte du champ des chefs d’œuvre qui trouvent leur grandeur non pas dans la durée, mais dans l’humanité qui aura fait défaut aux quatre volets de cette saga en constante progression artistique.

Box-office de John Wick 4

Véritable triomphe au box-office nord-américain, John Wick Chapitre 4 a achevé sa carrière à 187M$, contre 170M$ pour Parabellum, 92M$ pour le second tableau, et 43M$ pour l’épisode originel. Keanu Reeves s’est donc assis à la 9e place annuelle au box-office américain, devant Taylor Swift et ses airs de midinette, Indiana Jones et le cadran de la destinée, Mission: Impossible Dead Reckoning 1, Transformers: Rise of the Beasts, Creed III, Elémentaire et Fast X.

Si le film a lourdement chuté aux USA entre son premier week-end (73M$) et le second (28M$, soit une baisse de -61.6%), le film d’action bénéficiera d’une longévité exceptionnelle malgré la sortie successive de blockbuster de printemps. John Week s’installe dix semaines dans le top 7, dont une semaine à la première place et trois week-ends de plus en deuxième position.

A l’international, John Wick 4 a performé en suivant cette même croissance sans pour autant atteindre les sommets étasuniens. Le premier volet a assuré des recettes globales de 87M$, le second est passé à 171M$, Parabellum a poussé l’exploit à 326M$, et John Wick Chapitre 4s’est distingué avec 440M$, soit une hausse de cent millions de lingots et des poussières dorées.

Le Royaume-Uni (21M$) et l’Allemagne (20M$) ont été ses plus gros marchés hors USA, le film n’étant pas sorti en Chine. Mais on soulignera des scores solides en Australie (16M$), en Corée du Sud (15M$), en Russie et au Mexique (14M$)…

John Wick chapitre 4 a déçu en France malgré d’évidents atouts

La France, malheureusem*nt, a sous-performé malgré un investissem*nt promotionnel important. Lions Gate et Metropolitan FilmExport espéraient pouvoir capitaliser sur le décor parisien pour convaincre les masses, mais in fine, les recettes seront moyennes, avec seulement 7.9M$ de recettes hexagonales. Certes, c’était la première fois qu’un film de cette saga dépassait le million d’entrées (1 054 000 entrées contre 842 000 pour Parabellum, 335 000 pour le 2, et 401 000 pour le premier film), mais en faisant moins d’entrées que Babylon, Napoléon, Wish, Killers of the Flower Moon,, La nonne 2, Gran Turismo ou Transformers : Rise of the Beasts, la France fait figure d’exception culturelle.

Avec une première semaine faiblarde par rapport à ses ambitions (411 000 entrées dans 557 salles, la semaine du 29 mars), John Wick 4 a au moins su ne pas dégringoler en 2e et 3e semaines (qui ont respectivement pu cibler 236 000 et 155 000 entrées). C’est même devenu le premier film du distributeur Metropolitan FilmExport à dépasser le million d’entrées depuis A couteaux tirés, en 2019, malgré 40 sorties entre temps et de très lourdes pertes pour notre distributeur du cœur, Metropolitan Filmexport.

John Wick 4 restera 3 mois consécutifs dans le top 20 des meilleures ventes de DVD/Blu-ray et reviendra régulièrement dans le top 20 pendant les mois de novembre et décembre 2023, mois propices aux achats de Noël, avec des intégrales qui rempliront leur mission, botter le cul aux franchises Disney et aux éditions de studio historiques. Aussi, pour conclure, nous n’oublierons pas de signifier que l’excellence de John Wick, en tant que saga, a été possible car réalisée hors agenda des majors, occupées à des créations moins belliqueuses et plus faciles à marketer car tous publics. La violence de John Wick 4 a effectivement imposé une interdiction aux moins de 12 ans en France, ce qui a forcément eu quelques petites conséquences pour cette bastonnade grandiose qui aura, vraisemblablement droit, un jour, à un chapitre 5.

Frédéric Mignard

La franchiseJohn Wick

Sorties de la semaine du 22 mars 2023

Biographies +

Chad Stahelski, Ian McShane,Keanu Reeves,Laurence Fishburne,Lance Reddick,Hiroyuki Sanada,Clancy Brown,Donnie Yen,Bill Skarsgård,Shamier Anderson